Photo journal
(Swans - 25 janvier 2010) Hello Swans ! Il est toujours délicat de relire son travail 20, 30, 40 ans après. La mémoire, le vécu, la réalité de l'image, le non-dit de cette représentation instantanée s'interpellent. A l'évidence deux constats s'imposent : Le choix de la photographie reste valide. Dans un reportage toujours réalisé dans l'urgence, mon tri a été souvent instinctif. Avec le temps, je m'aperçois qu'il reste pertinent.
Le deuxième constat sera plus abstrait, l'image faite il y a 30 ans prend une réalité saturée d'histoire, elle me confond avec ma propre interprétation du temps passé depuis.
C'est fou ! Une image parle, devient bavarde, part dans tous les sens mais revient à l'essentiel :
Je suis fixe. J'existe. Tu as voulu me faire, je ne peux changer, être refaite, débrouille-toi, cerne-moi, explique-moi si tu le veux mais rappelle-toi je suis d'apparence incomplète. Il serait vain de me classer là ou ici. Je suis unique, prête à toutes les interprétations, mais attention, ta réalité, aujourd'hui, dépasse certainement celle d'hier. Bon courage !
Je vous propose un ensemble d'images sur la classe ouvrière française, celle d'avant.
Celle qui construisit les 30 glorieuses à ses frais, écumant les miettes de la reconstruction. Une vie de prolétaire améliorée.
J'arrive en 1964, à 20 ans, comme témoin, spectateur privilégié de sa résurrection sociale. Journaliste-reporter-photographe je fixe sur mes pellicules ses conditions de vie, ses colères, sa misère, ses joies, son utopie—un monde meilleur—Oh ! Pas pour elle ; pour l'avenir de ses enfants.
Elle revient de loin, esclave de l'ancien régime, libérée pour être mieux exploitée au 19ème siècle, chair à canon au 20ème siècle, considérée comme une simple variable d'ajustement en ce début du 21ème, elle s'exprime rarement. Cette classe laborieuse, silencieuse, elle courbe son échine, a honte d'elle-même et se suicide ! Pour la tenir docile, nous avons inventé un mode de vie—La société de consommation—un nouvel opium du peuple.
« Les aspirations des pauvres ne sont pas très éloignées de la réalité des riches ». (Pierre Desproges)
A vous de voir mes photographies. Mes commentaires seront des souvenirs, du rêve, des regrets, des petits mensonges. Réécrire l'image n'est pas mon propos, mais la remettre dans son contexte et dire pourquoi, donne un cadre. J'essaierai de le transgresser.
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Jean-Claude Quiqueré, plus connu sous le nom de Jean-Claude Seine, est né en 1944 à Gennevilliers, en France. Journaliste et reporter photo dès l'âge de vingt ans, il a travaillé pour nombre de journaux, notamment l'Humanité, La Vie Ouvrière, Le Matin de Paris, et Jeune Afrique. Membre de l'Agence Snark-International, avec Agnès Varda et William Klein, ainsi que de l'Agence DPI à New York, il participe à nombre d'expositions collectives autour du thème du prolétariat. Il est également l'auteur de deux livres, Un Mois de Mai Très Occupé aux Editions Le Temps des Cerises, et Acteurs du Siècle aux Editions Le Cercle d'Art. En 1968, il est reporter pour La Vie Ouvrière où paraissent ses photos des manifestations. Après une vie de voyages, il est maintenant établi à Nîmes, dans le sud de la France. On peut voir ses photos sur sa Galerie Web. (back)