Marie Rennard
(Swans - 25 janvier 2010) Si notre coin français a choisi ce premier numéro de Janvier pour vous présenter le travail de Jean-Claude Seine, qui a consacré des milliers de pellicules photo à la classe ouvrière, celle que Marx seul aujourd'hui ose appeler prolétariat, ce n'est pas un hasard.
2010 s'ouvre sous les auspices d'une crise économique qui dure ; de l'émission quasi hystérique d'avis sur le sujet de l'identité nationale -- chasse au bouc émissaire qu'on a si mal tâché de couvrir du nom de débat, où l'on entend les élus proférer des propos dignes de figurer dans une édition de perles du baccalauréat ou du bistro de la gare (1) ; de l'opportunité de légiférer sur le port de la burqa ; et du front de la grippe.
Pendant ce temps, nous rappelle Marie Laetitia Gambié, dix pour cent de notre population vit en dessous du seuil de pauvreté, et nombreux sont ceux qui végètent à un seuil de décence mineure, juste assez pour dire J'me plains pas, not' bon maître.
En 1968, les Français, las d'un système paternaliste archaïque dont l'élite vantait, sans la respecter, une morale à deux balles, descendaient dans la rue à la conquête de leur rêve américain. Jean-Claude Seine, âgé de vingt ans à peine et armé de son appareil photo était là, partout où l'on courait à la recherche du bonheur. Dans la rue, dans les usines, dans les foyers d'accueil, dans les foyers tout court. Il a longtemps renâclé à parler de ses photos, sûr qu'elles parlaient d'elles mêmes. Puis il a accepté, enfin, de rappeler quelques photos un contexte, le chant des oiseaux, la pub Dubonnet, le regard d'une femme...
Le chant des oiseaux, les regards de femmes. Quand on regarde les photos de Jean-Claude Seine, quand on parcourt ses souvenirs, on se rend compte que rien ne ressemble à hier plus qu'aujourd'hui. Dans cet article du Monde, Emmanuel Todd nous livre son analyse de la France de Sarkozy. « La réalité de la France », dit-il, « est qu'elle est en train de réussir son processus d'intégration », mais notre Président, pour occulter le désastre économique, « fait de la confrontation avec les pays musulmans un élément du jeu intérieur ».
Désigner un coupable, n'est-ce pas le meilleur moyen de se dédouaner de sa propre responsabilité, et devrons-nous donc toujours accoster en terres infertiles ?
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Marie Rennard sur Swans. Marie est l'éditrice en chef du coin français.
Note
1. Dans la bouche de Nadine Morano : « L'Edit de Nantes a été signé à Versailles, Il a créé la guerre entre catholiques et protestants ». Y'a des profs d'histoire qui se foutent en l'air pour moins que ça. (back)