Swans Commentary » swans.com 21 septembre 2009  

 


 

 

Swans en français

 

Plaidoyer de la comtesse d'Arcira
 

 

 

 

Textes fameux

 

 

 

 

 

 

Plaidoyer de la comtesse d'Arcira accusée d'Adultère, extrait du Dictionnaire Philosophique de Voltaire, article Adultère. 1764.

Version en ligne du Dictionnaire Philosophique : http://www.voltaire-integral.com/Html/00Table/4diction.htm#A

Traduction anglaise :

for loading http://www.gutenberg.org/etext/18569

Read online http://www.gutenberg.org/catalog/world/readfile?fk_files=237218

(Swans - 21 septembre 2009)  

L'évangile a défendu l'adultère à mon mari tout comme à moi; il sera damné comme moi, rien n'est plus avéré. Lorsqu'il m'a fait vingt infidélités, qu'il a donné mon collier à une de mes rivales, et mes boucles d'oreilles à une autre, je n'ai point demandé aux juges qu'on le fît raser, qu'on l'enfermât chez des moines, et qu'on me donnât son bien. Et moi, pour l'avoir imité une seule fois, pour avoir fait avec le plus beau jeune homme de Lisbonne ce qu'il fait tous les jours impunément avec les plus sottes guenons de la cour et de la ville, il faut que je réponde sur la sellette devant des licenciés, dont chacun serait à mes pieds si nous étions tête à tête dans mon cabinet; il faut que l'huissier me coupe à l'audience mes cheveux, qui sont les plus beaux du monde; qu'on m'enferme chez des religieuses qui n'ont pas le sens commun, qu'on me prive de ma dot et de mes conventions matrimoniales, qu'on donne tout mon bien à mon fat de mari pour l'aider à séduire d'autres femmes et à commettre de nouveaux adultères.

Je demande si la chose est juste, et s'il n'est pas évident que ce sont les cocus qui ont fait les lois.

On répond à mes plaintes que je suis trop heureuse de n'être pas lapidée à la porte de la ville par les chanoines, les habitués de paroisse et tout le peuple. C'est ainsi qu'on en usait chez la première nation de la terre, la nation choisie, la nation chérie, la seule qui eût raison quand toutes les autres avaient tort.

Je réponds à ces barbares que lorsque la pauvre femme adultère fut présentée par ses accusateurs au maître de l'ancienne et de la nouvelle loi, il ne la fit point lapider; qu'au contraire il leur reprocha leur injustice, qu'il se moqua d'eux en écrivant sur la terre avec le doigt, qu'il leur cita l'ancien proverbe hébraïque: « Que celui de vous qui est sans péché jette la première pierre » qu'alors ils se retirèrent tous, les plus vieux fuyant les premiers, parce que plus ils avaient d'âge, plus ils avaient commis d adultères.

Les docteurs en droit canon me répliquent que cette histoire de la femme adultère n'est racontée que dans l'évangile de saint Jean, qu'elle n'y a été insérée qu'après coup. Leontius, Maldonat, assurent qu'elle ne se trouve que dans un seul ancien exemplaire grec; qu'aucun des vingt-trois commentateurs n'en a parlé. Origène, saint Jérôme, saint Jean-Chrysostome, Théophylacte, Nonnus, ne la connaissent point. Elle ne se trouve point dans la Bible syriaque, elle n'est point dans la version d'Ulphilas.

Voilà ce que disent les avocats de mon mari, qui voudraient non seulement me faire raser, mais me faire lapider.

Mais les avocats qui ont plaidé pour moi disent qu'Ammonius, auteur du IIIème siècle, a reconnu cette histoire pour véritable, et que si saint Jérôme la rejette dans quelques endroits, il l'adopte dans d'autres; qu'en un mot, elle est authentique aujourd'hui. Je pars de là, et je dis à mon mari: « Si vous êtes sans péché, rasez-moi, enfermez-moi, prenez mon bien; mais si vous avez fait plus de péchés que moi, c'est à moi de vous raser, de vous faire enfermer, et de m'emparer de votre fortune. En fait de justice, les choses doivent être égales. »

Mon mari réplique qu'il est mon supérieur et mon chef, qu'il est plus haut que moi de plus d'un pouce, qu'il est velu comme un ours; que par conséquent je lui dois tout, et qu'il ne me doit rien.

Mais je demande si la reine Anne d'Angleterre n'est pas le chef de son mari? si son mari le prince de Danemark, qui est son grand amiral, ne lui doit pas une obéissance entière? Et si elle ne le ferait pas condamner à la cour des pairs en cas d'infidélité de la part du petit homme? Il est donc clair que si les femmes ne font pas punir les hommes, c'est quand elles ne sont pas les plus fortes.

 

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Published September 21, 2009



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